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lundi 6 juin 2011

Live review : Nasser + Orchester + M.I.L.K (03/06/11, Théâtre des Chalands, Val-de-Reuil)


Un théâtre peut-il être un lieu approprié d'une quelconque façon à un concert orienté électro-rock-metal-post-dub-trip-hop ? me demandè-je avec anxiété tandis que nous arrivons sur le lieu du show, quelque part dans la splendide ville de Val-de-Reuil, authentique bourgade toute de ferraille et de béton qui me semble aussi adaptée à l'évènement que ne l'était Notre-Dame-de-Gravenchon, superbe ville à l'économie pétrochimique florissante, à la venue de Gojira il y a quelques années.

Le concert a lieu dans le cadre des Soirées du Caméléon, qui ont fait venir Musica Nuda l'avant-veille, Babylon Circus la veille, et qui amèneront Les Blérots De Ravel le lendemain ; autant dire qu'on peut louer l'initiative du département culturel de la ville. L'organisation est d'ailleurs plutôt cocasse : luttant contre le jeunisme ambiant (mes 25 ans me placent déjà bien au-dessus de l'âge médian du public de la soirée), quelques quadra- voire quinquagénaires encore fringants nous servent sandwiches et bières, de la Northmaen bien entendu, Normandie oblige, à deux euros le demi.

La Normandie sait faire mieux que le cidre. Dieu la garde.

M.I.L.K a la charge d'ouvrir la soirée, et leur mélange de dub et de post-rock marche plutôt bien ; mais il serait dur de résumer leur prestation à la seule musique, car le groupe propose une mise en scène basée sur le concept d'un régime politique futuriste centralisé, organisé par le tout-puissant Ordre Social qui traque les moindres signes de rébellion pour étouffer la contestation dans l'œuf et assurer la stabilité du régime en place. Chaque chanson est ainsi précédée et suivie d'une mise en scène, parfois un peu longuette, accompagnée d'images de synthèse plutôt réussies ; malheureusement, cette mise en situation, bien qu'audacieuse, est risquée, pour deux raisons. La première, c'est qu'on pourrait croire le message un peu trop naïf, primaire, immature. La seconde, et principale, c'est que la réussite de ce genre d'effet dépend énormément de la réaction du public, qui a été quasiment inexistante ce soir -- ennui ou effet de surprise ? Difficile à dire. La prestation garde néanmoins un charme spécial grâce à cette théâtralisation, et ce (encore une fois) malgré quelques longueurs, qui sont largement compensées par la grande qualité de la musique que nous offre le quatuor, quelque part entre le post-rock énervé et le dub/trip-hop rehaussé de nombreux samples. Les visuels pendant les chansons ont aussi un grand charme, montages d'images "en vrac" quelque part entre un animisme très écolo et une haine farouche de l'armement et du capitalisme en général (les cinéphiles reconnaitront, pêle-mêle, Fight Club, THX 1138, Lord Of War...).


"Dystopie". Le visuel projeté sur scène est exactement celui-ci.

Après cette entrée en matière surprenante et agréable, Orchester prend possession de la scène. J'avais déjà parlé de ce que je pensais des versions acoustiques de leurs chansons, ainsi que de l'amour sans bornes que je voue à la belle chanteuse Faustine dont le charme presque animal m'avait littéralement subjugué. Il est possible que ma longue digression ait d'ailleurs déçu une partie du lectorat, s'attendant à un plus grand sérieux et une plus grande objectivité. Après tout, j'aurais pu faire le même genre de chroniques pour Noein, lui aussi groupe normand comportant deux femmes en son sein, et parler là aussi de l'amour sans bornes que je voue à la belle chanteuse Jenny dont le charme presque animal me subjugue littéralement à chaque concert, et je ne l'ai pas fait. Cette fois-ci, je ne m'étendrai pas plus sur Faustine, car lorsque Orchester reprend sa fougue naturelle, tout le monde contribue à l'immense frisson teinté de folie que transporte déjà férocement leur habile hybride de trip-hop et de metal, et notamment la belle violoniste Anne-Laure dont le charme presque animal m'a littéralement subjugué tout au long de ce concert et à qui, depuis, je voue un amour sans bornes.

De gauche à droite : Anne-Laure, KLM, Faustine. (*ronronne*)

Je pourrais également vouer un amour sans bornes à chacun des autres membres du groupe si ma farouche hétérosexualité, dont j'essaie pourtant avec ténacité de me débarrasser depuis que j'ai réalisé qu'elle réduisait de moitié le panel de mes coups de foudre, ne s'opposait à mes passions. Le côté metal des compositions d'Orchester ressort sur scène, non seulement par le jeu de chacun, mais également par la fougue incroyable du sextette entier, bondissant et suant comme un animal en chasse, et chaque instrumentiste s'amuse avec les autres, leur grimace et leur tourne autour, avec une complicité incroyable qui contribue encore à la prestation du groupe ; et pourtant, cela n'empêche pas la douceur, la mélodie et l'émotion, les duos violon-violoncelle envoûtants et le souffle aigre-doux de Faustine qui, au détour d'un contretemps saillant ou d'une ligne de basse piégée, nous hérissent les poils des bras et nous collent à la gueule un grand sourire mouillé de larmes.

Genre : encore mieux que sur cette vidéo. Et avec un public dix fois plus en forme. ("La Colère", tirée de "Before Meeting Together Again".)

La quasi-intégralité du nouvel album "The Craftsmen", sorti le premier juin, est interprétée, et cet album s'annonce tout simplement magique. Que dire de plus ?.. KLM, alias Clément Mirguet, membre fondateur du groupe, ainsi qu'Anne-Laure et Faustine, qui forment avec lui le trio de composition d'Orchester, ont apparemment réussi avec cet opus l'exploit qu'ils avaient frôlé avec "Before Meeting Together Again". Plus électro, plus envoûtant, plus percutant, rien n'est à jeter dans ce qu'on a entendu de l'album ce soir -- et j'attends impatiemment de recevoir mon exemplaire de l'album pour confirmer la claque prise en concert. Pour les intéressés, voici la playlist du concert, les titres de "The Craftsmen" étant en gras :

Le Jeu de l'Oie
Pooch
Halo
To the Land of the Sun
Mi Tierra
Victoria
The Favorite
La Colère
Before Meeting Together Once Again

Rappel :
Your Reign
The Craftsmen
White Page 
Sing to Me

Après une telle rafale, il aurait fallu que le trio marseillais Nasser fasse très fort pour parvenir à faire bouger mes membres endoloris et mon corps ruisselant de sueur. Problème : le groupe n'arrivera pas au même niveau. Il y a pourtant de l'idée dans ce mélange d'électro lorgnant avec la techno française et de rock très vintage, mais ce mélange n'est pas assez poussé à mon goût. Prenons I Am Un Chien !!, par pur exemple -- pas seulement pour le plaisir de faire un lien vers un autre groupe de ce site, mais aussi parce que Nasser a ouvert pour eux de nombreuses fois. I Am Un Chien !! est un groupe qui a réussi à fusionner avec un grand talent des influences électro/techno et rock/metal pour créer leur propre univers, quelque chose de groovy, de métallique, de froid, de dansant. Nasser, à l'inverse, semble hésiter et ne pas trop savoir sur quel pied danser : une track tellement techno qu'on se demande à quoi sert le batteur sur celle-ci enchaîne avec une chanson de rock'n'roll à peine agrémentée de sons de machines, mais les deux univers semblent se battre en permanence et ne pas atteindre de compromis. Après un Orchester, leur son paraîtrait presque fade ; je les aurais préférés en première partie, pour tout dire.

Celle-ci parvient pas trop mal à mélanger les deux aspects. Pas ma came, en tout cas. Trax et Télérama vous diront le contraire, en revanche. (Clip de "Come On".)

C'est donc un peu déçu par Nasser, mais du "The Craftsmen" plein la tête, que je quitte la salle, me demandant quand Orchester aura enfin la reconnaissance qu'il mérite, et résolument décidé à continuer à faire partie de ceux qui feront tout pour que ça arrive.



Les MySpace/sites officiels, dans l'ordre :
http://www.myspace.com/milkdubrock   /   http://milkdub.com/
http://www.myspace.com/orchester   /   http://orchester.fr/ (mort pour l'instant)
http://www.myspace.com/wearenasser

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