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mardi 26 juillet 2011

Live review : Dour Festival, jours 0 et 1 (aka "Bienvenue Ailleurs")


Le Dour Festival, le truc de dingues dont j'entends parler depuis que Gojira tripe dessus dans "The Link Alive", est enfin à ma portée, FUCK YEAH ! L'affiche de cette année m'a convaincu. Dans le désordre le plus total : Neurosis, Gallows, Le Bal Des Enragés, Radium, Cypress Hill, Russian Circles, Vitalic, Les Petits Pilous, Mogwaï, CocorosieBoris (pas celui de "Soirée Disco", mais le groupe japonais qui a notamment collaboré avec SunnO))) et Merzbow... dans un autre genre, donc), et j'en oublie.


C'est donc surexcité que je fais le trajet en covoiturage avec deux parfaits inconnus rencontrés via la page Facebook du festival, Samir et Zoumzen, deux sacrés allumés. Trois heures et demie de voyage, sur du Matt Elliott, du Neurosis, du Casey et Zone Libre, du DJ Shadow, du Radium, du Bassnectar... Ca met dans l'ambiance. Dans la camionnette qui nous suit, Marion, ma camarade de voyage rouennaise, seule survivante de l'écrémage des Douriens ("j'ai pas assez de sous", "ça tombe au mauvais moment", voire même aucune raison de ne pas venir -- juste la flemme), discute avec Rabby et Soazig, deux allumées également, en écoutant de l'électro bizarre, de la dub, je sais pas quoi. Je suis tombé dans le bon véhicule ; le tri par sexe n'était finalement pas une mauvaise idée.

Vous n'avez pas fini d'entendre parler de ma haine du reggae et de la dub.

L'arrivée sur le site du festival n'est pas trop chaotique, à ma grande surprise : relativement peu d'attente, le "parking" (un superbe champ, forcément) est bien foutu... Il n'y a que la demi-heure de marche des véhicules à nos places de camping qui sera un peu difficile. Car forcément, la veille du festival, à huit heures du soir, impossible de trouver une place près de l'entrée. C'est finalement au bord d'une barrière dans le camping du fond, encore quasiment vide, que nous installons les trois tentes et la bâche aussitôt-posée-aussitôt-taggée qui sera si pratique à repérer pour rentrer à notre campement, le soir, après les concerts (quatre/cinq heures du matin).

Nos tentes sont quelque part au fond du camping, au bord du champ en bas à gauche de cette photo. (Crédits : Dour Officiel)

Dès le premier soir, l'ambiance du Dour est posée : ça boit, ça se défonce, ça hurle, ça chante, ça rit dans tous les sens. Il n'y a qu'à gueuler "qui a de la beuh ?" dans un camping pour pouvoir en trouver -- je ne fais pas partie de ceux qui le hurlent, mais ça m'amuse de voir ce petit manège. Tout le monde parle à tout le monde, on tente de bredouiller quelques mots d'anglais, un peu d'espagnol par-ci, un peu d'italien par-là, on partage les bouteilles et la bouffe. Incroyable.


C'est donc après une première nuit pas vraiment reposante (et un trajet épique jusqu'au LIDL le plus proche pour faire quelques stocks de nourriture, bière et Redbull) que le festival en lui-même commence. J'aurais voulu jeter un œil à Rolo Tomassi, groupe de metal-jazz-porte-nawak-core qui a l'air d'envoyer de la clé de douze, mais nous arriverons trop tard sur le site, un peu avant seize heures. A l'entrée dudit site, juste après la file immense de boutiques improvisées (des T-shirts "Goéland style" aux véritables djembés sud-africains, en passant par le bar à chichas, je vous jure), on tombe sur le Balzaal, le chapiteau des party animals.


Cette photo a réellement été prise au début du premier jour du festival.

En début de première journée, une demi-heure après le début du premier live, un public impressionnant y est déjà tassé, comprimés à l'intérieur de la tente comme devant son entrée, en train de sauter devant Murdock, qui mixe une dubstep bien énergique mais super-commerciale. Après cinq minutes de compression totale, quelque part entre euphorie et agoraphobie, je ressors en sueur de cette marée humaine compacte. Il est d'ores et déjà acquis que je ne passerai que très peu de temps à l'intérieur de cette tente -- mais que, si ma condition physique me le permet, je resterai sans doute pas mal devant.

Un petit aperçu de Murdock au Dour Festival de l'an dernier.

Nous arrivons sur la grand-place : la Last Arena, scène immense, la seule en plein air, accueille Systema Solar, une sorte de reggae/dub/latino comme j'aime -- c'est-à-dire que je n'arrive pas à supporter plus de trois minutes. Mon ouverture musicale a ses limites, et ma clémence a ses règles (à une majuscule près, je sombrais dans le graveleux, tiens) : j'aime autant le dub qu'une vasectomie sans anesthésie. Je fuis donc courageusement la Last Arena, qui me reverra passer plus tard.



En attendant, au bout de cette place se tient le ClubCircuit Marquee, un des six chapiteaux du site, qui accueille le groupe de rock/punk Drums Are For Parades, sacrément entraînant, mais dont nous ne verrons pas grand-chose ; car quelques dizaines de mètres plus loin, sous le Dance Hall (probablement le chapiteau sous lequel j'aurai passé le moins de temps), Marion et moi découvrons The Budos Band, étrange hybride de funk et de "musique du monde" aux sévères relents hippies. Entièrement instrumentale, leur musique est enrichie par la grande diversité des instruments utilisés : trompette, cor, percussions viennent compléter le line-up "de base" guitares-basse-batterie, et chacun prend le temps de nous délivrer quelques soli étonnamment pas chiants -- ce qui est une qualité rare pour des soli.


Ce premier concert auquel nous assistons est une très bonne découverte et un apéritif savoureux. Et d'ailleurs, pour fêter ça, un parfait inconnu m'offre un beignet au chocolat. Bizarre, à sa place, j'aurais gardé les quatre ! Quand je lui demande pourquoi, il me répond juste : "C'est le Dour, mec !". Je comprends instantanément que je veux être naturalisé Belge.


A peine le temps de se commander une petite bière (à deux euros quarante... il fallait bien un point noir quelque part) et Misteur Valaire investit la Last Arena, c'est-à-dire la grande scène ouverte, pour ceux qui n'ont pas suivi. Le quintette de Sherbrooke nous livre une performance en forme de grande kermesse : sortes de Monsieur Loyal, les cinq Québécois feront plus tard tomber la veste blanche à dorures pour exhiber leurs vestons colorés (orange, rouge, bleu, turquoise, violet, crampe oculaire assurée), sans jamais arrêter de bondir dans tous les sens, de passer d'un instrument à l'autre avec une facilité déconcertante et, visiblement, de s'amuser comme des gosses.


C'est musicalement où j'accroche moins : leur mélange d'électro/jazz et de touches de hip-hop, de funk, de french touch, finit par me lasser par sa naïveté. Nous en profitons pour nous ruer avec un peu d'avance vers le ClubCircuit Marquee pour le premier concert "couillu" du festival.

En effet, à dix-huit heures, ce sont les punk-slash-coreux de Gallows qui investissent un des chapiteaux, pour une heure de grosse claque hardcore. Le chanteur, un roux au corps sec et tatoué de quasiment partout, est torse nu dans le public dès la première chanson, et malgré une maladie dont il s'excusera platement ("I'm sick as fuck"), il parviendra à tenir son set bon gré mal gré, essoufflé, assoiffé, crachant toutes les trente secondes, mais debout et fier -- il ira jusqu'à faire un peu de corde à sauter avec le fil de son micro, comme pour dire merde à ce qui semble être une grosse infection pulmonaire.

Crédit photo : Olivier Donnet.

Derrière lui, les musiciens assurent comme des monstres, mais son énergie et sa fraîcheur subliment encore leur travail. Il est plutôt drôle de le voir offrir dix euros au premier qui sautera d'un des pylônes qui supportent le chapiteau, pour dire une minute plus tard à un des deux "candidats" de redescendre un peu avant de sauter ("Go down. Don't jump for me, you'll fucking kill someone.").



On remarquera la présence, brève mais agréable, de la chanteuse de Rolo Tomassi, dans un style très différent de celui de son groupe, pour le coup, mais la demoiselle s'en tire avec les honneurs. C'est l'air de rien une belle leçon de scène que nous donnent les Gallows, définitivement le groupe qui me fait aimer le hardcore.


Setlist
The Riverbed
Leeches
London Is The Reason
Come Friendly Bombs
Kill The Rhythm
Black Heart Queen
Gold Dust
Misery
I Dread The Night
In The Belly Of A Shark
Orchestra Of Wolves

Après cette heure de circle-pits et de sauts frénétiques, un peu de repos ne fait pas de mal. On repère les stands de nourriture, toujours trop chers, mais on finit par craquer pour un sandwich bizarre qui dégueule de ketchup, avec une petite bière pour faire descendre. On entrevoit Channel Zero sur la grande scène, un heavy-metal vaguement noirci dont le chanteur pousse des cris ridicules ("the best metal band Belgium has ever known", assure leur site Internet -- rire sous cape), on rate Alpha 2.1 (si ç'avait été Alpha 5.20, j'y serais allé, juste pour rire), I'm From Barcelona est provisoirement annulé... On prend son temps.

Et comme le festival propose une bière gratuite pour quarante gobelets ramassés par terre, on file un coup de main intéressé aux bénévoles.

Les deux sets suivants nous réconcilient avec la guitare old-school. Tout d'abord, sur la grande scène, Kyuss, du stoner/rock pêchu, prenant, rondement mené, certes sans grande excentricité, mais sévèrement agréable. (Voir la setlist du concert.)


Ensuite, Foals, une sorte de rock anglais, mais en mieux... Energique, mais jouant toujours sur des ambiances envoûtantes, le combo anglais, dont le troisième album "Antidotes" a déjà beaucoup tourné sur mon iTunes, mène une heure d'un set carré, mené à la perfection, qui enchaîne sans temps mort des compositions flirtant parfois avec le post-rock et l'atmosphérique, parfois revenant à un rock plus "simple et efficace", sans jamais sauter trop brutalement d'un style à l'autre, sans jamais nous ennuyer.



La première journée n'est pas encore finie, et les grands concerts ne pourront bientôt plus se compter sur les doigts de la main...

Setlist
Blue Blood
Olympic Airways
Total Life Forever
Balloons
Miami
After Glow
Spanish Sahara
Red Socks Pugie
Electric Bloom
Two Steps, Twice

Il est vingt-trois heures, l'ambiance musicale commence à changer. Sur la grande scène, la tête d'affiche du jour est le mythique Cypress Hill, que je ne me fatiguerai pas à présenter ; malheureusement, il ne vaut pas non plus le coup de décrire en détail leur set. La scène est trop grande pour deux rappeurs et un DJ ; il n'y a pas cette énergie de groupe que d'autres, y compris en hip-hop, parviendront à nous communiquer.

D'autant que le DJ, caché en quasi-permanence par les fumigènes et la fumée de douille, compte pour un demi.

Alors, certes, c'est toujours un plaisir de gueuler "Insane in the Brain" en même temps que quelques milliers d'autres, ou de voir un rappeur se claquer une grosse douille de weed en plein concert et lutter comme un forcené pour ne pas s'étrangler avec, mais ce sera à peu près tout. A minuit, l'appel de l'électro qui tâche se fait sentir, malgré la fatigue qui arrive... et, accessoirement, une certaine ivresse.

Le seul stand du site du festival qui ne nous aura pas vus.

Oui, une ivresse, oui, facilitée, pour la petite histoire, par une mesure pseudo-écologique du festival : ramasser quarante gobelets vides permet d'obtenir une conso gratuite. C'est pourquoi, dans la première journée seulement, nous ramasserons pas moins de six cents gobelets à trois, ce qui nous offrira trois litres trois quarts de Jupiler. Il n'y a qu'à se baisser pour pouvoir boire à l'œil : en visant une fin de concert sous un chapiteau, cinq minutes suffisent à ramasser les quarante gobelets. A trois, en un petit quart d'heure, nous arrivons même à en ramener deux cents quarante d'un coup, se faisant ainsi offrir une pinte chacun. Le pied (et, pendant les concerts les moins intéressants, ça occupe -- c'est ça ou dormir, mais nous ne serons fatigués que dans un ou deux jours).

Fuck yeah.

La Balzaal me fait quelques clins d'œil auxquels je ne résiste pas, et je parviens même, me tortillant et jouant un peu du coude, à m'introduire au cœur du chapiteau, face à la scène, réalisant avec surprise que la foule est légèrement moins compacte à l'intérieur que devant l'entrée. C'est donc moins oppressé que prévu que je m'échauffe les muscles, refroidis par Cypress Hill, sur la drum'n'bass pas bandante mais efficace de Netsky, en attendant l'arrivée de Noisia sur scène. A ceux qui ne connaissent pas ce trio des Pays-Bas, je recommande vivement l'écoute de toute leur discographie, voyage hétéroclite au pays de l'électro qui tâche, consanguin drum'n'bass/dubstep aux restes de techno. Sur la Balzaal, une nouvelle dimension a été franchie : ambiance festive incroyable, transition parfaite de la drum'n'bass patatoïde au véritable son Noisien, ce set a été une putain de tuerie.




Le temps que le trio arrête de nous violer les oreilles, il est déjà deux heures du matin, le T-shirt colle au bonhomme (et les bonbons au papier, comme dirait Georges Abitbol), et avec cette déferlante monstrueuse que je viens de me ramasser sur le coin de la gueule, ça ne va pas être facile d'accrocher sur Boys Noize, dont la prestation semble pourtant intéressante. J'y jette un œil pas plus curieux que ça, encore à moitié essouflé, en coulant une petite Jupiler (la énième de la journée, avec N de l'ordre de la vingtaine).

Crédits : Dour Officiel.

Le passage du duo français Beat Torrent me motive à aller explorer le fin fond du site (côté droit -- j'aurai de nombreuses occasions de visiter le côté gauche, entre autres pour la Cannibal Stage qui abritera beaucoup de concerts de metal et de hardcore) où trône, solitaire et un peu recluse, le Magic Soundsystem. Les deux DJs extraits du quatuor C2C (quintuple champion du monde de turntablism, allez jeter un œil sur Youtube) y donnent une prestation efficace, consistant en une flopée de remixes, de Daft Punk à Led Zeppelin.


Les ayant déjà vus en première partie de Popof l'an dernier sur les quais de Seine, je n'y trouve rien qui me surprenne vraiment : leur set est très bon, et cela ne me surprend pas. En revanche, mes jambes me lâchent, bien qu'il soit "à peine" trois heures du matin. Il paraît que la fin du set de Beat Torrent a tourné au dubstep... Je ne peux que me contenter de croire les rumeurs. Le confort tout relatif de mon mince matelas autogonflant vaut tous les Ritz du monde, et les éclats de rire que provoque en moi l'humour totalement absurde de nos voisins de camping me fait m'endormir avec un grand sourire.



Jour 2 : Paradis
Jour 3 : Tenir la Distance
Jour 4 : Apothéose
Jour N+1 : Ending Credits



Toutes les photos de cet article ont été prises par Marion, sauf mention contraire.
Retrouvez une impressionnante collection de photos du Dour sur leur Flickr officiel.

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