Suivez Modern Zeuhl

Modern Zeuhl est surtout sur Facebook.

samedi 12 février 2011

Album en mousse : Krabathor, "Orthodox"


Cela fait tellement longtemps que cet album me pourrit les oreilles qu'il m'a motivé à créer une petite catégorie de chroniques : la catégorie "album en mousse". Je n'irai pas jusqu'à dire que ceux qui aiment Krabathor ont de la merde dans les oreilles, non pas par respect pour le manque de bon goût, mais parce que je crains les représailles armées. Néanmoins, une petite remise dans le contexte s'impose.

1998, ça nous paraît loin. Mais quand on prend le temps de fouiller un peu, on se rend compte que ç'a été un bon cru pour le death-metal. Du côté des pionniers, Cannibal Corpse nous en remet une couche avec son sixième (excellent) album "Gallery of Suicide".

Miam, sombre comme on aime.

Morbid Angel en est à la sixième lettre de son alphabet (qui sera peut-être achevé d'ici 2050, allez savoir) : "Formulas Fatal to the Flesh" fait trembler les chaumières. Le groupe rebondit superbement après le départ de son chanteur historique David Vincent (celui qui les a vus) et sort un album plus sombre, presque glauque -- tendance qui sera suivie par le groupe pour l'album suivant, "Gateways to Annihilation", une petite merveille.

2001 : Morbid Angel tire la langue à David Vincent en sortant son meilleur album sans lui.

Death en est déjà à son septième album, "The Sound of Perseverance", une petite merveille de metal progressif, avec des titres d'une force incroyable (à commencer par "Scavenger of Human Sorrow" qui ouvre l'album, "Spirit Crusher", "Flesh (and the Power it Holds)"... en fait, un peu tous les titres). Hélas, le dernier album du groupe, puisque Chuck Schuldiner, chanteur, guitariste et compositeur du groupe, meurt trois ans plus tard, rongé par ce putain de crabe et achevé par la médication qui lui est donnée.

Merci pour tout, Chuck. Puisses-tu reposer en paix.

Les petits nouveaux ne sont pas en reste en cet année de grâce. Avec son troisième album "Obsolete", Fear Factory fait éclater au grand jour son propre style musical, puissant, racé, mélodique ; le martèlement de la batterie de Raymond Herrera, les riffs de guitare implacables de Dino Cazares et le grain de voix extraordinaire du chanteur Burton C. Bell révolutionnent le genre.

"Conceived in a hell beyond your depth of perception" : la première ligne des paroles annonce la couleur.

Le troisième album des suédois d'Opeth, "My Arms, Your Hearse", est acclamé par la critique, comme tous ceux qui suivront. Le style s'affine, le concept est travaillé, les talents de composition de Mikael Akerfeldt sont définitivement reconnus.

Mikael Akerfeldt, prends-moi.

Troisième album également pour Meshuggah : "Chaosphere" est une bombe, un concentré de folie et de puissance, une déferlante de rythmiques folles et d'ambiances tordues et schizophréniques, un chef-d'oeuvre, et le groupe devient définitivement une source d'inspiration pour tout un pan du metal. Rien que ça.

Well... not that sane, I guess.

Et il y en a encore d'autres : le deuxième album d'Arch Enemy, projet death mélodique d'un ancien Carcass ; le premier album de Soilwork ; "Obscura", ou ce que Gorguts a fait de meilleur et de plus noir ;  et j'en oublie. Et au milieu de tout ça, Krabathor.

En plus d'avoir un nom ridicule, le groupe tchèque excelle dans l'art du visuel pourri. Non, mais sérieusement, comparons un peu. "Chaosphere", par Meshuggah :

Représenté ci-dessus : vue d'artiste d'une IRM du chanteur.

"Obsolete", par Fear Factory :

Représenté ci-dessus : le spermatozoïde le plus joli du monde.

"The Sound of Perseverance" de Death :

Représenté ci-dessus : ah tiens, "Maciste aux Enfers" a été colorisé ?

Même dans les pas connus, regardez la pochette de "Steelbath Suicide" de Soilwork :

Représenté ci-dessus : metal + LSD = pochette qui pique.

Pas trop mal, non ? Et maintenant, rejetez un oeil à la pochette de "Orthodox" :

Non représenté ci-dessus : un quelconque talent artistique.

Sérieusement, comment peut-on avoir simultanément un cerveau en état de marche et l'envie de faire une pochette d'album si moche ? Et encore, vous n'avez pas sous les yeux le dessin noir et blanc d'un tas de crânes qui décore le CD lui-même, ni la photo de groupe superbement kitsch qui va avec. Et vous voulez rire ? Le batteur du groupe s'appelle Skull. Ca ne s'invente pas.

On continue, un putain de musée du stupide. Le chanteur et parolier nous gratifie d'un texte autre que les paroles des chansons, d'une philosophie incroyable, jugez plutôt :

"Everything what we felt was as it had to be ; everything what we'll feel will be as it have to be ; we can't change the fate ! Only we know that death is the end of this way through life !"

Une fois qu'on vire les fautes ridicules et qu'on traduit, ça donne :

"Tout ce qu'on a ressenti était comme ça devait être ; tout ce que l'on ressentira sera comme ça devra être ; on ne peut changer le destin ! Tout ce que nous savons est que la mort est la fin de ce chemin au travers de la vie !"

"Wouah, le sens de la vie enfin révélé. Et si j'allais méditer tout nu au pied d'un arbre ?"

Putain, j'en chiale. Et là, je ne parlais que du non-musical, parce que la musique est une putain de bouillie sonore. Blasts tout le temps, son de basse saturé, gueulantes sans originalité, riffs copiés-collés, il n'y a rien là-dedans qui soit original, et du coup pas grand-chose d'intéressant. Pendant que, tout autour, même les "vieux de la vieille" font évoluer leur musique, Krabathor fait du death "comme avant". Et ces solos de guitare, mon Dieu... Celui de la première chanson "Orthodox" donne déjà envie de faire sauter le skeud à coups de poing : "couiiiine, couiiiiine", comme Morbid Angel le faisait avant eux, et Slayer encore avant (et c'est d'ailleurs la seule chose insupportable dans Slayer : leurs solos suraigus inutiles sur toutes les putains de chansons). Dans la deuxième chanson : le même solo. Dans la troisième... dans la quatrième... arf, je vous laisse deviner. Le solo de la troisième est plus court, car elle ne dure qu'une minute douze, ce qui en fait la chanson la plus supportable de l'album.

Pif, paf, pif, paf. Du death "un peu trop" orthodoxe...

Aurai-je également la méchanceté de parler de ces roulements de caisse claire totalement bancals ? De la force émotionnelle sans précédent de la superbe "Shit comes brown", dont le refrain, répété deux fois en à peine plus d'une minute (avec un solo minable au milieu, donc), est une répétition de ces trois mots huit fois de suite ? Ce serait un peu tirer sur l'ambulance.

Je ne dirai rien sur "Shit Comes Brown", faites-vous votre propre opinion.

Mais enfin, merde, quoi : sautez d'une chanson à l'autre, en prenant des moments de chaque chanson au hasard, et vous retrouverez toujours les mêmes rythmes, toujours les mêmes "grrr, grrr" pathétiques, toujours les mêmes riffs déjà-vu, toujours les mêmes lignes "mélodiques", toujours les mêmes breaks mal inspirés, toujours les mêmes fins de morceau "oups, j'ai tombé dans l'eau".

Une autre façon de le dire.

Une petite explosion de synthé sur "Body as a Cover" nous fait nous demander s'ils ne vont pas essayer de faire autre chose. Ben non. Cette explosion de synthé grandiloquente restera seule -- je veux dire qu'ils ne la remettent même pas à l'identique dans le morceau. Comme si elle avait été là par accident -- le mauvais bouton appuyé au mauvais moment. L'intro de "Parasites" fait le même effet : un léger effort a été fait sur la mélodie de basse, qui se voit affliger une belle réverb en mode "lover"... et puis tout le monde repart à l'ancienne. Un accident aussi... qui, quand même, revient plus loin dans la chanson. A l'identique. Une vingtaine de fois de suite. Avec un vieux solo de guitare de merde par-dessus, rhâââââh !

Ci-dessus : deux fans de Krabathor en pleine discussion métaphysique.

Et la dernière, "About Death", la plus longue d'ailleurs (six minutes) ? Point positif : il y a autre chose que des blasts dedans. Bien sûr qu'il y en a, mais pas que. On sent que le groupe a eu envie de faire quelque chose de différent pour la dernière : intro au clavier -- au son en carton, mais passons -- et rythmes plus posés. Points négatifs : toujours pas inspiré, toujours pas original, et... ah oui, elle dure six putains de minutes.

Vous n'êtes pas obligés de l'écouter en entier. Cliquez quelque part au hasard vers le milieu, vous allez rire : ça fait pif, paf, pif, paf.

Le pire, c'est que Krabathor, en cette année 1998, peut s'enorgueillir (et même se vante carrément) d'avoir joué en première partie de Vader, Cannibal Corpse, Deicide, Impaled Nazarene, Kreator, Dimmu Borgir... Ce qui veut dire qu'à l'époque, des gens trouvaient leur musique bonne ?

Non, je ne peux pas me résigner à y croire.



Si vous voulez que je vous offre cet album (oui, je dis bien "offrir", je m'en débarrasse), envoyez-moi un mail à l'adresse "standard" : modernzeuhl@gmail.com -- premier arrivé, premier servi.


EDIT -- 4 mars 2011 : j'ai cru trouver un preneur entre-temps, mais il a acheté d'occasion pour 7 euros. Si vous le voulez pour moins cher, contactez-moi !

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Moi je trouve ce groupe vraiment bon au contraire.
C'est domage de les critiquer comme ça, ils ont quand même réussi à se faire un nom dans le millieu tout en venant de République Tchèque ce qui ne doit pas être chose facile !

Pour ce qui est de la pochette c'est pareil, elle est originale, provocante et fait passer un message en quelque sorte, elle montre l'horreur de la guerre, elle ne peut laisser indifferent.
Enfin pour moi elle fonctionne.

Modern Zeuhl a dit…

Le concept même de "l'album en mousse" m'ôtait dès le départ toute volonté d'objectivité -- j'aurais pu l'appeler "la chronique du troll", à la limite. Tout n'est pas à jeter, et lorsque je me moque des fans de Krabathor, c'est bien entendu à prendre au second degré.

Le goût musical est quelque chose de si subjectif que je ne peux pas trop prétendre pouvoir qualifier un album d'absolument "bien" ou d'absolument "à chier".

Bref, cette chronique a d'abord vocation de jeu, et j'ose espérer qu'elle saura faire rire jusqu'au fan de Krabathor, qui y décèlera de l'ironie un peu facile et non de la prétention rageuse de la pire espèce.

Ma chronique "en mousse" de Morbid Angel semble ne pas avoir eu le même effet... C'était mignon tout plein ^^

Enregistrer un commentaire