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mardi 5 juillet 2011

Alkalys


Mon Dieu, je suis terriblement en retard sur moi-même. Cela fait maintenant presque deux mois que je veux parler d'Alkalys, quatuor haut-normand formé en 2006, et de leur dernier album "A Pack of Lies", sorti le 1er mai 2011, et presque deux mois que j'oublie. Certes, il y a eu du nouveau depuis, des concerts en veux-tu en voilà, des interviews, et j'en passe, mais toutes les raisons du monde ne pardonneraient pas de passer à côté d'une beauté si imposante.

Si Alkalys était une femme.
("Bien joué, la photo de nichons, tu vas attirer plein de monde sur ton blog.
- Euh... Je l'ai pas fait pour ça, en tout cas. C'est juste que j'aime bien les jolies filles à poil.
- Ah.")


Trois albums au compteur de cette formation originaire d'une ville que je ne croyais peuplée que de simiesques gérontes armés de fourches. Un album éponyme, tout d'abord, que je n'ai toujours pas réussi à me procurer, et qui officie apparemment déjà dans un post-rock relativement ouvert, quelque part entre Tool et Mogwaï, pour le plus grand plaisir des oreilles comme de l'âme. Je pense, moi aussi, que malgré les petits défauts inhérents à la jeunesse du groupe, et notamment quelques influences relativement peu discrètes, l'OMNI Alkalys accouche en cet an de grâce 2007 d'un premier album enivrant, beau comme Cavanna lisant du André Breton aux obsèques de Léon Blum -- et je ne doute pas qu'un jour, l'écoute de l'album me confortera dans cette opinion.

"C'est vivre et cesser de vivre qui sont des solutions imaginaires. L'existence est ailleurs ! ...merde, ma feuille. Où sont mes cachets ? Putain de Parkinson, salope infâme."

En 2009, c'est le très réussi "Choeur Délys" qui prend la suite. Un album dont un chroniqueur de W-Fenec dira, je cite :
Errance solitaire aux confins du réel, là où s'arrête le concret et où débute l'imaginaire, ce qui relève du phantasme, de l'utopie, le groupe l'explore par le biais d'un album qui stimule notre inconscient et façonne nos chimères.
Autant dire que le prochain qui me reprochera mes élans oniriques aura l'air idiot quand il ira lire ce que font ceux de mes camarades inconnus qui ont "franchi le cap", quittant le partiel amateurisme dans lequel je stagne encore pour entrer dans le professionnalisme (toujours honnête et critique, ceci dit, puisqu'ils encensent par exemple le dernier August Burns Red comme le dernier Shaka Ponk, clairement les deux meilleurs albums de ce début d'année, n'est-il pas ?). Allez, trêve de pitoyables critiques tout sauf franches, ma mauvaise foi me perdra.

D'autant que, cette fois-ci, je suis vraiment d'accord avec eux. ("Main Courante".)

"Choeur Délys" est clairement un bon album. Un très bon album. Un putain d'excellent album. Du post-rock aérien (l'étrange "Loup-Ange" et ses paroles en français déclamées par une drôle de voix grave -- qui, pour le compte, me rappelle vaguement le groupe Ange) teinté de sonorités plus noise, flirtant avec l'ambiant (la planante entrée en matière de "Sink", une immersion post-psychédélique des plus prenantes ; la superbe "Rhododendron", incroyablement apaisante) comme avec le postcore enragé (la vibrante "DB3,14IN") ou le mathrock ("Happy Carbonara" -- qu'est-ce que c'est que ce titre ?), mais ne tombant jamais dans le piège de l'idolâtrie trop marquée, celle qui ferait l'auditeur se dire à chaque chanson "tiens, ça fait vraiment penser à Machin", "oh, j'ai déjà entendu ce riff dans le premier album de Bidule" ; Alkalys a sa façon rien qu'à lui de nous emmener en voyage, et "Choeur Délys" nous prend par la main comme aucun autre. Pas forcément plus fortement, plus violemment, plus sereinement ; juste d'une façon unique, avec une sombre douceur dont les nuances sont inédites.

Allez, un petit extrait live, pour fêter ça.

Comment aller encore plus loin ? Comment nous arracher encore plus l'âme et nous surprendre encore plus ? Alkalys est parvenu à relever le défi, sans même y penser, comme ça. "On a juste fait ce qu'on avait envie de faire", semblent-ils nous dire, avec un petit "Na !" dans le fond. Leur nouvel opus, "A Pack of Lies" (2011), est une tuerie. Le groupe a pris un virage surprenant, loin du lieu commun totalement horripilant qui veut que les groupes aillent toujours en se calmant, puisque sa recherche esthétique a beaucoup puisé dans le postcore, voire même le post-punk ; et en cinq titres et un peu moins de quarante-cinq minutes, il nous fait décoller avec une finesse et une maîtrise rares : ambiances posées et arpèges délicatement mélancoliques comme préambules à la fureur triste d'un postcore prenant (le titre "A Pack of Lies"), en équilibre instable entre rugosité et douceur ("Inferno Black Clouds"), autant attiré par une colère presque punk ("Red Cross on the Highway") que par une mélodicité bien plus proche du post-rock (la belle intro de "Incandescence"), le tout avec très peu de chant, comme pour nous le faire encore plus apprécier. Alkalys a affirmé et encore personnalisé son style avec "A Pack of Lies", pour mieux nous cracher la vérité de son émotion brute et sans artifices, et ça marche incroyablement bien.

"999", la seule track de l'album que je n'ai pas citée dans le paragraphe qui précède. Mais elle vaut, elle aussi, son pesant d'or.

Ils iront loin, ces petits...



MySpace : http://www.myspace.com/alkalys

Bandcamp ("A Pack of Lies" en écoute intégrale) : http://basementapesind.bandcamp.com/album/a-pack-of-lies

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