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jeudi 30 juin 2011

Live review : Sepultura + Zoe (26/06/11, Le 106, Rouen)


Vingt-sept ans de carrière déjà pour Sepultura, un des groupes emblématiques du metal, qui a eu l'audace de mélanger death-metal, thrash et musiques tribales. Arise (1991), dernier album avant le virage tribal du groupe, puis Roots (1996), sont deux albums au statut d'objets cultes, inventifs et techniquement irréprochables. Le départ de Max Cavalera, frontman et figure de proue du groupe (avec son frère Igor, batteur jusqu'en 2006), a laissé les fans de la première heure désemparés et amers ; Soulfly, formé par Max Cavalera dès son départ de Sepultura, n'a jamais véritablement atteint la qualité d'un "Roots", et le nouveau Sepultura a été dénigré par une grande partie du public metal, d'autant qu'il a débuté avec les albums "Against" (1998) et "Nation" (2001) qui sont tout sauf des chefs-d'œuvre. Pas facile pour le Sepultura du XXI° siècle de réussir à trouver sa place, violemment attaqué par les nostalgiques de l'ancien temps qui se sont empressé de cracher sur Derrick Green, le nouveau chanteur.

S'ils avaient été face à lui, ils n'auraient sans doute pas osé.

Après un petit "retour aux sources", quelque part entre qualité et parodie, avec "Roorback" (2003), les deux concept-albums "Dante XXI" et "A-lex" (2006 et 2009 respectivement) ont emprunté un chemin tout nouveau, plus cru, plus expérimental, presque iconoclaste, qui a définitivement éloigné les plus réacs des fans de la première heure et obtenu une adhésion croissante de la part des autres. Puisque Igor Cavalera a quitté le groupe entre ces deux albums, c'est avec un line-up qui ne compte plus qu'un membre originel du groupe (le bassiste Paulo Jr., bien qu'il se plaise à rappeler qu'il n'a plus rien d'un junior) que Sepultura allait venir défendre son petit dernier, "Kairos", moins conceptuel et plus rentre-dedans, quelque part entre death et thrash.

La chanson-titre de l'album. Mouais.

En première partie, le groupe Zoe semble bien peu à sa place : pratiquant un rock qualifié de stoner par une grande partie de la presse, mais s'affirmant comme un simple groupe de rock'n'roll, le combo ch'timi n'est pas forcément la première partie la mieux adaptée pour un groupe comme Sepultura. Le public n'accroche d'ailleurs que très peu au concert et l'ambiance dans la fosse est à peu près inexistante... Ah, bande de rétrécis du bulbe, que vous savez être difficiles ! J'en connais des comme vous, petits pédants obtus, qui ont massivement hué un pauvre DJ de metal-indus qui passait en première partie de Rammstein aux Arènes de Nîmes le 23 juillet 2005, sous prétexte qu'il ne jouait pas assez fort et que même si quand même que de toute façon qu'on était viendu pour Rammstein -- et bizarrement, aucune trace de cet incident sur leur DVD "Volkerball", alors que le show de Rammstein y est reproduit en intégralité, et qu'on y voit une foule surexcitée et incroyablement a-do-ra-ble. Si tu as fait partie de ces râleurs méprisants, lecteur-ou-trice, sache que je te conspue de toute mon âme.

Trudball.

Cette fois-ci, les spectateurs n'ont pas hué. Certains sont restés par curiosité ; d'autres, non conquis ou franchement indifférents, sont passés par la case réapprovisionnement (ouais, le bar, ouais). J'ai fait partie des quelques-uns, une poignée, totalement ébahis, captivés par l'énergie du groupe. Même devant cent ou deux cents badauds inertes, Zoe envoie un set carré, gras et qui tâche, y mettant tout son cœur et toutes ses couilles (huit, si j'ai bien compté, et sauf déformation génétique ou accident de parcours que la présence de vêtements m'a empêché de constater de visu). Pourtant, pour me faire aimer du rock "à l'ancienne", il faut vraiment y aller... moi qui suis allergique au rockab', moyennement convaincu par le psychobilly, et à qui trois notes de Mötörhead provoquent une nausée indescriptible ! Mais non, Zoe m'a laissé pantois, tout simplement, et même s'il est probable que l'écoute de leur deuxième (et nouvel) album "Dirty Little Sister" ne me fasse pas le même effet, particulièrement à volume modéré, je garderai un grand souvenir de ce live plein d'énergie, dynamique, rigolard, lors duquel je suis parvenu à rester indifférent à la mollesse générale du reste du public, qui visiblement n'était pas là pour s'amuser.

"Make It Burning" live... il y a quasiment quatre ans. Dites-vous qu'ils ont été encore cent fois meilleurs cette fois-ci.

Après les quarante minutes de leur set, l'adorable manager de Sepultura les expulse gentiment de la scène, sous nos regards ébahis et un peu écœurés. J'avais déjà été quelque peu excédé par son comportement, passif mais insistant, lors de la courte interview de Paulo pour la webradio du 106 [NdR : la vidéo viendra bientôt, tenez-vous au courant via la page Facebook de Modern Zeuhl], et surpris par son inquiétude à l'idée qu'un mouvement de foule puisse survenir s'il devait traverser quelques mètres "publics" pour atteindre la bulle radio de la salle. Cette star-attitude, du reste bien plus prononcée chez ledit manager que chez le doyen du groupe, me plaçait déjà à une grande distance du cercle des fans, que leur inanité lors de Zoe n'a fait qu'augmenter encore.

Vade retro.

Oubliant ces considérations plus que subjectives, je tente de me focaliser sur le concert lui-même, aussi neutre que possible, et de le suivre jusqu'au bout par une sorte d'acquis de conscience journalistique qui m'a déjà fait encaisser beaucoup, de Malkhior à Nasser. Hélas, trois fois hélas ! Où est passée l'énergie du groupe ? Sepultura est devenu un groupe "standard", dont les lives sont carrés mais relativement creux, et que seule l'adoration aveugle (comme toutes les adorations) du public sauve de l'indifférence. Entre le batteur Jean Dolabella, déchaîné et incroyablement puissant derrière ses fûts, et le chanteur Derrick Green dont le charisme ostréique a dévalorisé une prestation vocale pourtant raisonnable dans l'ensemble, les deux papas de la scène Paulo Jr. et Andreas Kisser assurent leurs parties convenablement, le premier à fond dans sa musique mais plutôt discret derrière son instrument, le second avec un visage relativement inexpressif et en en faisant parfois des tonnes -- façon d'être en parfait accord avec sa désagréable tendance au solo inutile qui vient saupoudrer trop régulièrement la prestation du groupe d'un zeste d'ennui.

Franchement, ce chanteur est une moule, non ? (Il en faudrait bien plus pour nous faire croire que "Sepulnation" groove.)

Je ne peux pas non plus être que mauvaise langue, étant donné que Sepultura a assuré un set carré et bien foutu, habilement soutenu par la technicité jamais tape-à-l'œil et la furie dévastatrice de Jean Dolabella, et qu'ils m'ont fait le plaisir de placer au milieu dudit set la grandiose "Choke", une des tracks les plus sombres et, justement, étouffantes de la carrière du groupe. En revanche, le son un peu surchargé en basses n'aidait pas forcément à apprécier la musique à sa juste valeur, comme pour s'adresser exclusivement aux fans qui connaissent tout le répertoire du groupe par cœur, et j'ai été très déçu par le dernier morceau interprété par le groupe. "Surprenez-moi", me disais-je, "et montrez-moi que vous allez de l'avant !" Perdu : le set, comme je l'avais malheureusement prévu, s'est terminé par une version de "Roots Bloody Roots" trop fidèle à l'originale, dans laquelle Derrick Green n'a fait que parodier assez vulgairement la façon de chanter de Max Cavalera sur la version studio.

The Matrix n'a jamais eu de suite, la trilogie Star Wars n'a jamais eu de préquelles, Yes a arrêté de jouer juste après l'album "Relayer", Phil Collins n'a jamais existé, et ceci est le dernier clip de Sepultura.

Deux groupes, et deux surprises, au final : les Zoe qui parviennent à me faire aimer le rock, et Sepultura qui parvient à me faire rester immobile devant un concert de death. Etrange soirée...



Pas besoin de faire de publicité à Sepultura, qui a déjà une sérieuse renommée ; en revanche, je ne peux que vous encourager à écouter Zoe sur leur site officiel, à aller les voir sur scène, voire à acheter leur superbe deuxième album au digipack tout simplement magnifique.


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