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mercredi 15 juin 2011

The Schönberg Automaton


Quand on lui demande qui est Schönberg, Google nous renvoie Béatrice, notre présentatrice-vedette de la télé-poubelle du service public avec sa bouche à l'envers, mais aussi Arnold, compositeur d'origine autrichienne ayant officié lors de la première moitié du XXe siècle. Sa grande influence sur la musique classique de ce siècle est mise en exergue dans l'article Wikipedia par de superbes phrases comme celle-ci :
Recherchant de plus en plus le systématisme de la construction musicale dans l'esprit du classicisme du XVIIIe siècle tel que synthétisé par Johannes Brahms, mais dans une expression moderne — il s'agit donc d'une double transcendance de l'esprit bacho-mozartien, car c'est finalement dans le « conservateur » Brahms que Schönberg reconnaît le véritable novateur — il inaugure en 1923 une technique de composition fondée sur la notion de série qui le place à l’avant-garde du mouvement musical.

Les deux lecteurs à peu près attentifs, là, au fond, ne manqueront pas de demander : "Quel est le rapport avec le groupe dont cet abruti [NdR : c'est moi] va parler ici ?" Très honnêtement, je me le demande encore. The Schönberg Automaton, groupe australien né en 2009 de la rencontre de trois musiciens venant d'autres groupes (Empyrean, Function Cease et Cross the Lips of Grace), n'a de Schönberg que le nom. Leur façon de construire un metal technique, déstructuré et cohérent, ne semble rien devoir à une quelconque forme de composition sérielle, et le résultat qu'ils obtiennent est aussi proche de la musique classique, du moins dans la forme, que les tuyaux de poêle de l'humour contemporain.

Eli, Eli, lama sabachtani ?

Le groupe ne nous a pour l'instant gratifié que d'un EP autoproduit de douze minutes à peine, mais qui nécessite aisément plusieurs dizaines d'écoutes et d'explorations. "The Woodhouse Sakati Syndrome", qui ouvre cet EP, met les choses au clair : on y trouve clairement des influences du "techno-death mélodique" de groupes comme l'excellente formation française Gorod, mais sans que cela ne tourne jamais à la parodie, avec une efficacité et une finesse surprenantes. "Pineapple Juice & The Tough Stuffed Olive" montre ensuite d'autres facettes du groupe, partant un peu plus loin, empruntant un peu au mathcore, que ce soit sur le plan mélodique ou dans la structure mouvante du morceau, mais laissant la place à des attaques de lourdeur quelque part entre le death et le hardcore. On n'a jamais le temps de se reposer, de se poser sur un rythme, sur une ligne mélodique, que la suite est déjà là ; et pourtant le résultat tient debout, forme un tout intelligent.

"Pineapple Juice & The Tough Stuffed Olive". Appétissant.

"Where Are We, In A Cube ?", qui conclut ce trop court EP, est sans doute la track la plus agressive de cet EP redoutable : la petite excursion bluesy de début de chanson ne nous fait pas oublier l'ambiance pesante du morceau, sorte de version neurotique du film Cube, musicalement quelque part entre la technicité ahurissante de The Faceless et la lourdeur mathématique de War From A Harlot's Mouth. Pour ne rien arranger, le mixage et le mastering sont presque parfaits, aboutissant à un rendu sonore toujours distinct, basses pas trop présentes, aigus jamais agressifs : un superbe travail.

"Where Are We, In A Cube ?"

En un mot comme en cent, The Schönberg Automaton est le genre de groupes à côté desquels on pourrait facilement passer. La technicité et le ressenti brut, quelque part entre l'aérien et le glauque, de leurs compositions aura vite écœuré pas mal d'auditeurs curieux. Mais, après tout, comme le disait Arnold Schönberg lui-même : "Si c'est de l'art, ce n'est pas pour tout le monde. Si c'est pour tout le monde, ce n'est pas de l'art."



L'EP est en téléchargement sur Bandcamp au prix minimum d'environ 45 centimes d'euro :

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