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dimanche 23 janvier 2011

5F_55


Parce que bon, la mélodie, ça va cinq minutes, mais il y a aussi des pépites injustement méconnues dans la musique industrielle. Le Grenoblois Sulphuric Saliva a déja été évoqué ici, dans la chronique duquel il a été dit la distinction que fait votre humble musicologue amateur serviteur entre le metal industriel, dans lequel le côté noisy consiste généralement en un durcissement ou une radicalisation des sonorités (j'aurais d'ailleurs pu y citer également d'autres très connus : Rammstein, Oomph!, KMFDM...), et l'électro industriel où, parallèlement à certains artistes très bruitistes, existent des artistes qui parviennent a créer de véritables ambiances à base de bruit.

J'y avais cité 5F_55, un duo d'industriel rythmique très surprenant. Ils ont été mes premiers pas dans l'indus, aux côtés d'autres plus violents (Hypnoskull notamment, dans la musique duquel on ne trouvera pas exactement la même satisfaction), et d'autres plus bruitistes que j'ai abandonnés depuis, une fois le simple plaisir de la nouveauté passé (de mémoire, les débuts d'Unter Null me plaisaient beaucoup, once upon a time). A contrario, 5F_55 est régulièrement craché par mes enceintes depuis une dizaine d'années, autant dire depuis leur premier album, sobrement intitulé "I", sorti en 2001.

Une fois la surprise du digipack passée (un simple collage de cartons recyclés épais sert de boîtier à tous les albums du label allemand Hands à cette époque, et la sobriété de la pochette de cet album en particulier va de pair avec la bizarrerie des titres des pistes, tous écrits en ASCII), l'album a fait vibrer ma petite chambre de lycéen de sonorités inédites : du bruit, certes, mais agencé avec une intelligence et un raffinement à la limite du paradoxe. Des rythmes appuyés, des sonorités tribales, des petites ambiances sorties de nulle part... Une création bizarre, à mi-chemin entre l'usine de fabrication de pièces métallurgiques et la cérémonie de transfiguration d'une tribu centrafricaine, terriblement envoutante et efficace une fois passée la première barrière du recul face au bruit. Et cette track magique, "4C2E 492E 532E 41" (traduisez : "L.I.S.A"), oh mon Dieu. Une rythmique implacable, des sonorités d'outre-espace, le tout fusionné avec la perfection d'un hit de dancefloor vénusien (quelle ne fut pas ma joie, d'ailleurs, de l'entendre quelques années plus tard mixé en live lors d'une soirée électro !).

Aaaaaaaah, "L.I.S.A", toute ma jeunesse.

L'année suivante, je me ruai sur leur deuxième album (intelligemment nommé "II") tout juste sorti pour l'écouter au moins autant que le premier. A première ouïe, peu de différences avec le premier, les mêmes racines musicales, le même amour de la distortion tout en finesse, la même inspiration précoloniale... Et puis, à force de le déguster, les nuances apparaissent, se creusent, se figent. L'ambiance de fonderie recule, prend le pas sur un son moins rentre-dedans et, étrangement, plus organique. L'humain fait entendre sa respiration et les battements de son coeur dans les palpitations de la machine. Un peu artisans du bruit, un peu alchimistes de la saturation, 5F_55 réussit un véritable tour de force en insufflant la vie dans l'industriel. Ne vous méprenez pas : c'est toujours de l'indus rythmique, aux aspects froids et martiaux, mais... Quand on se laisse emporter, quand on laisse ses préjugés auditifs sous le paillasson... C'est carrément une nouvelle approche de la musique, un nouvel angle sur l'esthétisme, que des groupes comme 5F_55 ouvrent.

"4769 6D6D 6520 6D6F 7265", alias "Gimme more", l'aspect plus "fonderie" de 5F_55. (Les pistes de leur deuxième album sont hélas introuvables...)

Deuxième, donc, et dernier album. "Quoi ? vous dites-vous. Cet abruti nous parle encore d'un groupe décédé ?" Pas exactement... Car le "II" de 5F_55 est en fait le témoignage d'une transformation. 5F_55 a mué en 5F-X, continuant encore à métamorphoser le bruit en une forme inédite d'esthétique musicale, intégrant mélodies et mélopées ambiantes à...

...mais c'est une autre histoire.



Cet article va de pair avec l'article sur 5F-X, successeur de 5F_55.



5F_55 a disparu sans laisser beaucoup de traces derrière lui : pas de site Internet à proprement parler (un 5F_55.de tout juste embryonnaire), pas de MySpace (qui est né en 2003, soit après que 5F_55 est devenu 5F-X). Quelques traces grâce à Google, quelques tracks sur Youtube, et bien sûr plein de nouvelles via 5F-X. Je suis prêt à fournir les deux premiers albums aux éventuels intéressés sur demande : contactez-moi a l'adresse modernzeuhl@gmail.com ou par commentaire a ce billet. Mais si vous adhérez vraiment, ne me dites pas que 13 euros, c'est cher pour un CD.

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