Le rock progressif n'est pas mort. Etonnant. Je pensais qu'il n'avait pas résisté à l'assaut des eighties, des batteries électroniques et du show-business.
John Bonham, le batteur des Led Zeppelin, meurt en 1980, un an après le très moyen album "In Through the Out Door" où la patte légendaire de Jimmy Page est écrasée sous l'abus d'héroïne. Le déclin lent de Genesis sur la fin des années 70, depuis le départ du génialissime Peter Gabriel, est flagrant quand on compare "The Lamb Lies Down on Broadway" (1974), une épopée progressive incroyable, à "Abacab" (1981), un album de pop mollasson et inutile. L'hégémonie de Roger Waters sur Pink Floyd, après avoir pondu le très beau, mais très éloigné du psychédélisme des débuts, "The Wall" en 1979, donne quatre ans plus tard "The Final Cut" qui ne mérite même pas le titre d'album des Floyds (David Gilmour réussira à ressusciter l'esprit de Pink Floyd dans le bien nommé "A Momentary Lapse of Reason" en 1987, pour recracher ensuite dans un dernier sursaut "The Division Bell", en 1994, oeuvre réussie de pop psyché-larmoyante, mais fossoyeur du rock progressif). L'inspiration hallucinogène de King Crimson sur ses premiers albums, notamment "In the Court of the Crimson King" (1969) et "Islands" (1971), fait place dix ans plus tard, lors de la première résurrection du groupe, à une musique qui semble plus basée sur la réflexion technique que sur l'inspiration "envolée", voire même franchement fumée, des débuts.
John Bonham, le batteur des Led Zeppelin, meurt en 1980, un an après le très moyen album "In Through the Out Door" où la patte légendaire de Jimmy Page est écrasée sous l'abus d'héroïne. Le déclin lent de Genesis sur la fin des années 70, depuis le départ du génialissime Peter Gabriel, est flagrant quand on compare "The Lamb Lies Down on Broadway" (1974), une épopée progressive incroyable, à "Abacab" (1981), un album de pop mollasson et inutile. L'hégémonie de Roger Waters sur Pink Floyd, après avoir pondu le très beau, mais très éloigné du psychédélisme des débuts, "The Wall" en 1979, donne quatre ans plus tard "The Final Cut" qui ne mérite même pas le titre d'album des Floyds (David Gilmour réussira à ressusciter l'esprit de Pink Floyd dans le bien nommé "A Momentary Lapse of Reason" en 1987, pour recracher ensuite dans un dernier sursaut "The Division Bell", en 1994, oeuvre réussie de pop psyché-larmoyante, mais fossoyeur du rock progressif). L'inspiration hallucinogène de King Crimson sur ses premiers albums, notamment "In the Court of the Crimson King" (1969) et "Islands" (1971), fait place dix ans plus tard, lors de la première résurrection du groupe, à une musique qui semble plus basée sur la réflexion technique que sur l'inspiration "envolée", voire même franchement fumée, des débuts.
Alors, certes, quelques aliens continuent à faire avancer modestement le style (je pense notamment à la survivance des groupes français Ange et Magma). Les autres s'éteignent doucement, ou même meurent, et la relève n'est pas toujours brillante. Les groupes se réclamant de l'esprit originel ne sont généralement que de plates parodies de psychédélisme (Pendragon et les Flower Kings en tête de liste), tandis que d'autres, souvent les meilleurs, sont ceux qui réintègrent certains des ingrédients du rock progressif à des musiques plus up-to-date, mais sans se réclamer d'une quelconque mouvance (mouvement initié par Watchtower, prolongé par les brillants Death, Cynic, Pain of Salvation, Dark Suns entre autres).
Et puis, étonnamment, on voit soudain se réunir des musiciens de différents projets de metal (le guitariste et le bassiste de Cynic, le batteur de Textures) pour sortir un unique album qu'ils qualifient de metal fusion, et on retrouve dans les lignes mélodiques, dans les inspirations, dans les envolées rythmiques, tout l'esprit du rock progressif qu'on croyait disparu, cette émotion directe, un peu "sous d'autres influences", et ce ressenti si particulier, chargé de bonnes énergies...
"Waves of Thought", tirée de l'unique album d'Exivious.
Exivious est né en 2007, a sorti un album éponyme en 2009, et a disparu en 2010. Une carrière très éphémère, un album très surprenant : déclaré comme groupe de metal/jazz, mais empruntant principalement aux débuts du progressif, l'album "Exivious" parvient à faire du simple tripatouillage technique que l'on pourrait légitimement craindre une oeuvre ensorcelante, toute en douceur malgré sa complexité apparente, n'empruntant au metal que certaines de ses constructions, mais chassant naturellement ses gimmicks pour nous ramener sur les terres consolantes du psychédélisme primal.
"Time and its Changes", sur laquelle on sent bien la touche de Cynic, autant que celle de Textures, le tout avec un esprit free-rock bien jazzy très seventies...
Attention, je ne parle pas de psychédélisme comme d'une expérience au goût d'interdit consistant à observer la dégradation conjointe de la pensée critique, de l'interprétation des signaux visuels et auditifs, et du négativisme sociétal, sous l'influence d'une quantité déraisonnable de LSD. J'utilise ici ce terme au sens étymologique : "révélateur de l'âme" ; et, sous cette acception non conventionnelle du mot, j'affirme que, par exemple, le postcore d'Ira ou de Neurosis, au même titre que l'électro de Venetian Snares ou le metal musclé de Gojira, sont des musiques psychédéliques (voire même des psychotropes puissants, mais c'est un autre débat). Cette petite mise au point sémantique effectuée, on rangera naturellement Exivious, à son tour, dans la grande famille des "nouvelles musiques psychédéliques" ; mais là où d'autres ont naturellement dévié dans d'autres styles, d'autres nuances, d'autres expressions sonores, la volonté d'Exivious de se laisser entraîner par une inspiration metal-fusion les a ramené inexorablement sur les terres du rock progressif, où ils ont réussi le tour de force d'apporter des couleurs encore nouvelles sur un terrain qu'on croyait en friche, labouré en tous sens et vidé de sa puissance émotionnelle.
Site officiel : http://www.exivious.net/ (l'album y est en écoute intégrale)
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